David est mort parce que la société laisse des hommes et des femmes à la rue.
La lutte contre les injustices est faite de joies, de peines, de générosité, de dons. Et parfois de drames. Des hommes et des femmes s’engagent entièrement, totalement pour les autres. C’était le cas de David. Le jeune homme de 28 ans est décédé dans la nuit du mercredi 27 au jeudi 28 janvier, à Saint-Étienne, alors qu’il essayait d’ouvrir un bâtiment vide. David voulait réquisitionner l’immeuble pour mettre à l’abri des personnes démunies, aider les plus faibles, les sans-droits. Sauver des vies dans un contexte de crise sociale sans précédent.
David faisait partie de ces Justes, qui ne peuvent accepter de voir des familles dormir dans la rue. Il était de toutes les luttes sociales. D’ailleurs, il avait déjà été arrêté pour avoir réquisitionné un immeuble en juin dernier, et devait être jugé pour cela. David est de ceux qui avaient donné un toit à des sans abris, des sans-papiers, et ouvert une vaste Maison des Peuples à Saint-Étienne.
Aucune de ces actions de réquisition n’est sans risque. Il faut escalader un bâtiment, éviter la milice, explorer, sécuriser… Cette nuit-là, le toit, vétuste, sur lequel il se trouvait, s’est effondré. David est mort parce que la société laisse des hommes et des femmes à la rue. David s’engageait totalement, mais il aimait aussi la musique, les concerts, les teufs. Il avait lui même un groupe de musique et aimait faire la fête. Il aimait la vie. Ses amis nous disent qu’il était aussi fier de ses origines bretonnes, et qu’il était venu soutenir la ZAD de Notre-Dame-des-Landes.
Ce 1er février, David devait passer au tribunal parce que la justice préfère condamner des personnes solidaires que la violence sociale et policière. Il n’y a pas eu de procès. Mais le rassemblement devant le tribunal de Saint-Étienne, prévu à cette occasion, a été maintenu, et s’est transformé en hommage. Comme samedi, des dizaines de personnes se sont retrouvées pour penser à lui, déployer des banderoles, pleurer ensemble.
Pour ses proches, et celles et ceux qui partageaient sa soif ardente de justice, David laisse un vide immense. Mais il restera toujours vivant dans leurs combats.
Un poème lu par son ami Claustinto :
    Il y a des gens sur les toits 
    Parce qu’il faut monter jusque-là
    Pour trouver de quoi se donner le droit
    De se sortir de l’injustice
    De l’impuissance et du froid
    Il y a des gens sur les toits
    Qui cherchent dans les recoins des villes
    De quoi accueillir et parler
    Et s’entendre et prendre des forces
    Rire, pleurer et être entendu.e.s
    De quoi sortir de la vie tous les jours
    Coincé.e.s entre la honte et la colère vide
    Il y a des gens sur les toits
    Pour qui c’est évident
    Qu’il faut se battre
    Et prendre ce qu’on ne veut pas nous donner
    Que ça a toujours été comme ça
    Et que ça le restera
    Tant que tout le monde ne sera pas sur les toits
    Il y a des gens sur les toits
    Et des gens dans les rues
    Des gens dans les usines
    Dans les cités dans les forêts
    Et les intimités
    Qui se battent et qui tombent et qui se relèvent
    Et qui parfois
    Ne se relèvent pas
    Il y a des gens sur les toits
    Qui nous font de grands signes avec les bras
    Pour nous dire venez si vous avez froid
    De la vie qu’on nous force à vivre
    Il y a d’autres endroits
    D’autres façons de se dire
    Des façons de ne plus subir
    Il y a des toits d’où on voit bien plus loin que soi
    Il y a des gens sur les toits
    Qui nous font de grands signes avec les bras
    Pour nous dire bonjour
    Et au revoir à la fois


